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Relier les résultats des tests de laboratoire aux dossiers des patients en Tanzanie et en Éthiopie
Les ministères de la santé de Tanzanie et d’Éthiopie ont intégré les données de laboratoire des appareils GeneXpert au DHIS2 afin d’assurer un transfert transparent des résultats des tests de dépistage de la tuberculose et du COVID-19, améliorant ainsi la gestion des programmes et le suivi des patients.
La disponibilité des résultats de laboratoire est essentielle à la réussite de programmes de santé efficaces, en particulier ceux qui visent des maladies hautement transmissibles d’importance pour la santé publique, telles que la tuberculose et la lèpre. Les données d’examen disponibles en temps utile jouent un rôle essentiel dans le diagnostic et le traitement des maladies, le suivi de l’évolution des interventions sanitaires et la prise de décisions cliniques éclairées, ce qui peut grandement améliorer les soins aux patients en permettant d’initier rapidement un traitement approprié. La généralisation et l’accessibilité des tests COVID-19, ainsi que la communication rapide des résultats, ont également permis de suivre et d’endiguer la propagation de ce virus, contribuant ainsi à atténuer l’impact de la pandémie.
Grâce au soutien du Fonds Mondial, des appareils de laboratoire fiables et peu coûteux – tels que le GeneXpert – sont désormais utilisés dans de nombreux pays à revenu faible et intermédiaire (PRFI) pour améliorer le dépistage de la tuberculose et d’autres maladies. Cependant, les processus manuels inefficaces de transfert des données des systèmes de laboratoire vers les systèmes d’information sanitaire (SIS) limitent la rapidité avec laquelle ces données peuvent être utilisées pour éclairer la prise de décision. Par ailleurs, les méthodes manuelles de déclaration entraînent également des problèmes de qualité des données, environ 4 % des erreurs dans les services de laboratoire au point de service étant dues à des erreurs de transcription. L’automatisation du transfert des données de laboratoire des machines de test vers le SIH peut contribuer à minimiser ces erreurs et à rendre les résultats des tests disponibles plus rapidement.
Récemment, deux pays y sont parvenus en intégrant avec succès GeneXpert à DHIS2. En Tanzanie, le programme national de lutte contre la tuberculose et la lèpre s’est associé au centre de recherche médicale NIMR-Mbeya dans le cadre de l’accord-cadre de mise en œuvre de la tuberculose (projet TIFA) – avec un financement de l’USAID et l’assistance technique du laboratoire DHIS2 de l’université de Dar es Salaam (UDSM) – pour intégrer les appareils GeneXpert au système national de lutte contre la tuberculose et la lèpre basé sur le système DHIS2 Tracker. Cela permet le transfert direct des résultats de laboratoire de la tuberculose, éliminant ainsi le transfert manuel des données et les erreurs qui y sont associées. Parallèlement, en Éthiopie, le HISP Ethiopia a soutenu la réponse nationale au COVID-19 en mettant-en-œvre le système DHIS2 Tracker pour la surveillance du COVID-19 basée sur les cas et en l’intégrant aux résultats des tests de GeneXpert afin de faciliter la notification et le suivi rapides. Le programme national de lutte contre la tuberculose prévoit de s’appuyer sur cette innovation pour améliorer la gestion des programmes de lutte contre la tuberculose.
Améliorer l’efficacité de la gestion des programmes de lutte contre la tuberculose et la lèpre en Tanzanie grâce à l’intégration de DHIS2-GeneXpert
Bien que la prévalence de la tuberculose en Tanzanie ait chuté de 32 % entre 2015 et 2021, la Tanzanie reste l’un des 30 pays où la tuberculose est la plus répandue. Pour que les programmes de lutte contre la tuberculose et la lèpre soient couronnés de succès, les services de diagnostic de précision doivent s’accompagner de mécanismes précis de communication des données. Cela entraîne souvent la nécessité de recourir à des équipements et à des solutions coûteux. Le GeneXpert est une alternative peu coûteuse, rapide et fiable pour le diagnostic de la tuberculose. Il fournit des résultats en quelques heures au lieu de quelques jours comme c’est le cas avec les méthodes de diagnostic traditionnelles. Ces caractéristiques ont rendu l’appareil très populaire dans les pays à faibles ressources, et son déploiement dans de nombreux pays à faibles ressources a été soutenu par des subventions du Fonds Mondial. Cependant, les résultats des tests effectués sur les machines GeneXpert ne sont pas partagés électroniquement avec d’autres systèmes, ce qui oblige à les copier manuellement, soit en les inscrivant à la main sur des registres papier, soit en les tapant dans d’autres systèmes numériques. Ces deux options sont lentes et peuvent entraîner des erreurs de transcription.
Pour assurer une transmission précise des résultats des machines GeneXpert vers les plateformes de santé numérique, plusieurs solutions d’interconnexion propriétaires existent actuellement. Ces solutions sont généralement coûteuses, nécessitent un soutien important et peuvent entraîner une dépendance prolongée à l’égard des développeurs pour la maintenance et les modifications en raison de leur nature propriétaire. Pour établir un lien électronique entre les résultats des tests GeneXpert et les dossiers des patients sans avoir besoin d’un système propriétaire, le ministère de la santé de Tanzanie a opté pour une solution conçue localement qui s’appuie sur la plateforme DHIS2, déjà utilisée dans le pays depuis plus d’une décennie. Par conséquent, le laboratoire DHIS2 de l’UDSM a développé une plateforme d’interopérabilité pour transférer les données entre les machines GeneXpert et le système existant DHIS2 Tracker de Tanzanie pour la déclaration des données sur la tuberculose et la lèpre (DHIS2-ETL), facilitant ainsi la saisie précise et rapide des données de diagnostic.
Pour ce faire, l’équipe de l’UDSM a développé une plateforme intermédiaire pour collecter les résultats de laboratoire de la machine GeneXpert et les traduire dans un format approprié pour les télécharger ensuite dans Tracker pour la déclaration de la tuberculose et de la lèpre basée sur les cas.
Le projet a démarré avec quatre unités de l’appareil GeneXpert à 10 couleurs installées sur quatre sites différents (tous les laboratoires zonaux de Tanzanie continentale). L’équipe de l’UDSM a développé un adaptateur d’interface comme couche logicielle intermédiaire, qui transcrit les résultats de laboratoire de l’appareil dans la plateforme logicielle DHIS2. L’adaptateur d’interface peut être hébergé sur l’ordinateur relié à la machine GeneXpert, sur le serveur exécutant DHIS2 ou sur un ordinateur séparé dédié à l’exécution de l’adaptateur. Cette polyvalence de déploiement renforce encore l’utilité des adaptateurs pour différents scénarios dans tous les laboratoires.
L’adaptateur d’interface a été développé pour simplifier le transfert de données et, en tant que tel, il a été conçu avec une interface utilisateur simple et facile à utiliser pour faciliter à la fois la configuration, la liaison avec la machine GeneXpert et l’utilisation ultérieure. Une fois configuré, l’adaptateur peut commencer à transférer les résultats approuvés soit en mode automatisé, les résultats étant transférés automatiquement au fur et à mesure qu’ils sont générés par la machine sans intervention de l’utilisateur, soit en mode à la demande pour le transfert dirigé par l’utilisateur de tests approuvés individuels.
Pour simplifier encore l’utilisation du système, l’équipe a activé une fonction de connexion unique, permettant aux utilisateurs de se connecter à l’aide de leurs identifiants existants sur le système de notification de la tuberculose et de la lèpre basé sur les cas du DHIS2. Cela améliore l’expérience de l’utilisateur en éliminant la nécessité de créer et de mémoriser plusieurs comptes pour chaque utilisateur.
Le système peut également servir de plateforme de médiation pour le transfert des données diagnostiques et logistiques de GeneXpert vers DHIS2. Cela permet aux gestionnaires de programmes, non seulement de suivre avec précision les données relatives aux diagnostics de laboratoire, mais aussi de prévoir les demandes futures de fournitures et de consommables associés à l’aide de données logistiques plus précises. Le système facilite également le transfert transparent des données nécessaires à la programmation et à la réalisation des activités de maintenance sur les machines GeneXpert, garantissant ainsi leur fonctionnement optimal pendant de plus longues périodes.
Après un projet pilote réussi en 2023, cette solution d’interopérabilité pourrait être étendue aux 342 machines GeneXpert restantes, réparties sur 306 sites de test en Tanzanie. La solution basée sur le DHIS2 n’étant pas propriétaire, elle peut également être étendue pour connecter d’autres appareils de dépistage de la tuberculose tels que Truenat.
Réutilisation et intégration des machines GeneXpert en Éthiopie pour le dépistage rapide de COVID-19
La pandémie de COVID-19 qui a balayé le monde en 2020 a créé un besoin urgent pour les pays de recentrer leurs efforts en matière de santé publique et de trouver des solutions innovantes pour répondre à cette nouvelle crise sanitaire. Pendant la pandémie, le HISP Éthiopie a aidé l’Institut éthiopien de santé publique à mettre-en-œvre le système DHIS2 Tracker pour la surveillance basée sur les cas de COVID-19. En Éthiopie, comme dans de nombreux autres PRFM, les machines GeneXpert existantes ont été réaffectées des tests de dépistage de la tuberculose au COVID-19. L’établissement d’un lien entre les données du DHIS2 sur les cas suspects et les résultats des tests de laboratoire effectués à l’aide des appareils GeneXpert a facilité la surveillance de la pandémie et la réponse à y apporter. Toutefois, l’une des principales difficultés rencontrées par le groupe de travail du centre d’opérations d’urgence de l’Éthiopie a été de saisir manuellement dans le DHIS2 les grandes quantités de données relatives aux tests COVID-19 générées au niveau des laboratoires dans le cadre des campagnes de sensibilisation et de dépistage de masse au sein des communautés. En l’absence d’intégration entre GeneXpert et DHIS2, ce processus était lent et sujet à des erreurs de saisie des données.
Pour pallier ce défi, le HISP Éthiopie a développé une appli de paramétrage de réception des laboratoires pour relier les résultats de laboratoire à DHIS2 via le logiciel de laboratoire GeneXpert/CEPHEID. L’appli permet aux réceptionnistes des laboratoires d’accepter des tests par lots provenant d’équipes de collecte d’échantillons et de lier chaque test à un identifiant unique pour chaque test/patient, à l’établissement de santé où l’échantillon de test a été prélevé et à un code-barres unique. Lorsque le résultat du test est prêt, les utilisateurs n’ont qu’à scanner le code-barres et le système met automatiquement à jour l’enregistrement correspondant dans DHIS2. Cela a permis de réduire considérablement la charge de travail et d’améliorer la qualité des données. Les données relatives aux résultats des tests sont ainsi disponibles beaucoup plus rapidement dans le DHIS2, ce qui facilite la notification rapide des résultats positifs du test COVID-19 aux patients, aux professionnels de la santé et à la taskforce.
Comme dans de nombreux pays, la pandémie de COVID-19 a eu un impact négatif sur la surveillance de la tuberculose en Éthiopie en 2020, entraînant une baisse des cas déclarés au cours du deuxième trimestre de l’année en raison de la perturbation des services de santé de routine et de la réaffectation des ressources limitées en matière de dépistage. Cependant, la pandémie a également produit des résultats potentiellement positifs pour le Programme national de lutte contre la tuberculose (PNT), car les innovations du DHIS2 déployées pendant la pandémie sont intégrées dans les efforts nationaux de gestion de la tuberculose. Il s’agit notamment de l’adoption par le PNT de DHIS2 Tracker pour la surveillance de la tuberculose basée sur les cas et la notification des cas, en commençant par un projet pilote pour la tuberculose multirésistante (TB-MR) qui a été lancé avec succès en septembre 2021 dans 67 établissements, avec le financement de l’USAID et du Fonds Mondial et l’assistance technique de JSI. Le PNT prévoit de continuer à développer ce système basé sur les cas pour couvrir l’ensemble de la cascade de soins dans les quelque 6 000 établissements de santé d’Éthiopie. Dans le cadre de ce plan, le PNT a identifié l’intégration de GeneXpert au DHIS2 comme un besoin essentiel pour soutenir l’utilisation efficace des données et le suivi des clients pour la tuberculose.
Défis et opportunités : Comment l’intégration DHIS2/GeneXpert peut contribuer à la réussite des programmes de santé grâce à un accès rapide à des données de qualité.
Dans ces deux cas, en Tanzanie et en Éthiopie, l’intégration du DHIS2 avec les machines de test en laboratoire a posé plusieurs problèmes. L’un des principaux obstacles est la pénurie de personnel qualifié et le taux de rotation élevé aux points de saisie des données. En outre, la connectivité Internet limitée et peu fiable constitue un goulot d’étranglement important, empêchant le téléchargement automatique des données des tests et la saisie des données en temps réel au niveau de l’établissement. Lorsque les données sont saisies sur papier et introduites dans le DHIS2 au niveau du district, il en résulte des problèmes de promptitude et de qualité des données, qui peuvent compromettre l’adéquation des données à une prise de décision éclairée. La disponibilité insuffisante de matériel et d’appareils pour la saisie des données contribue également aux retards et aux problèmes de qualité des données.
Malgré ces difficultés, l’intégration du SIS avec les données de laboratoire offre une série d’avantages, notamment en renforçant le suivi et l’évaluation des programmes de lutte contre la tuberculose grâce à des données diagnostiques et logistiques précises, opportunes et complètes. L’utilisation d’outils open-source prêts à l’intégration comme DHIS2 peut aider les pays à obtenir ces avantages à un coût inférieur à celui des solutions propriétaires. À l’avenir, la Tanzanie et l’Éthiopie prévoient de trouver des moyens de continuer à développer leurs systèmes de surveillance de la tuberculose basés sur les cas avec le DHIS2. Cela leur permet de tirer parti des systèmes existants, des capacités et des solutions innovantes mises au point pendant la pandémie de COVID-19 pour améliorer l’efficacité de leurs programmes de lutte contre la tuberculose.
La section de cet article consacrée à la Tanzanie est basée sur une présentation faite par Henry Kalisti du laboratoire DHIS2 de l’UDSM lors de la conférence annuelle 2023 DHS2.